QUOI DE NEUF?

La co-cathédrale de Gravelbourg retrouve ses couleurs grâce à la mobilisation locale

En août 2025, une journée particulièrement venteuse dans le sud de la Saskatchewan a endommagé le trésor historique qu’est la co-cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption de Gravelbourg lorsque l’un de ses vitraux s’est brisé. Mais de ce choc est née une mission, portée par une communauté locale dévouée.

Connu pour ses visites guidées détaillées et passionnées de la co-cathédrale, Louis Stringer a eu du mal à cacher sa surprise lorsqu’il a découvert, en pleine visite, l’un des vitraux de la cathédrale plié et pendant, accroché à une corniche.

Le guide a immédiatement su à qui faire appel pour restaurer l’œuvre : Dolorès Ferraton.

Un savoir-faire précieux

Depuis son installation à Gravelbourg, la Fransaskoise s’est fait connaître pour son talent en vitrail, un art qu’elle pratique depuis une vingtaine d’années, depuis ses premiers cours à Montréal.

« Les gens savent que j’offre des cours de vitrail ici à Gravelbourg, alors ils m’ont demandé si je pouvais réparer ça, raconte-t-elle. Et sur le coup, j’ai dit : “Oh oui, bien sûr !” sans réaliser dans quoi je m’embarquais… »

La bénévole a passé plusieurs semaines à remettre le vitrail en état. Mesurant près d’un mètre cinquante de hauteur, il a été soigneusement descendu et transporté jusqu’à son atelier.

« Certains morceaux de verre étaient brisés. Il fallait respecter les couleurs d’origine, mais heureusement, ce n’étaient pas des teintes complexes », explique-t-elle.

En fait, c’est plutôt la soudure qui a donné à l’artisane du fil à retordre : « Les soudures étaient tellement affaiblies qu’il a fallu toutes les refaire », dit-elle.

Et d’ajouter : « Normalement, pour les vitraux, on soude les pièces sur un ruban de cuivre. Mais pour quelque chose d’aussi grand, il fallait utiliser la baguette de soudure. C’est plus complexe, mais j’avais suivi une formation avec Brenda McLaughlin, de Moose Jaw, alors je savais quoi faire. »

Bien que l’artiste n’en soit pas à sa première restauration, c’est la plus importante qu’elle ait pu réaliser à ce jour.

« C’est sans aucun doute mon plus grand projet, mais j’adore ça. J’ai travaillé tous les jours jusqu’à ce que ce soit terminé. C’était un beau défi. »

Un testament du talent francophone

Lors de ses visites, Louis Stringer aime toujours rappeler les contributions francophones et locales à la co-cathédrale.

« À l’origine, les vitraux étaient peints sur du verre clair par l’artiste Mgr Charles Maillard, deuxième curé de la paroisse. Il a peint non seulement les vitraux, mais aussi les murs intérieurs », relate-t-il.

L’édifice a conservé ses vitraux d’origine jusqu’aux années 1970. « En 1978, l’évêque Noël Delaquis a constaté que les vitraux perdaient leurs couleurs. Il a décidé d’en faire venir de nouveaux de Bretagne, en France. »

Sur une période de six ans, un agent de Burns-Hanley, à Regina, a supervisé leur remplacement, suivant un plan conçu par la famille Rault, de Rennes.

La même famille et la même agence avaient réalisé, quelques décennies plus tôt, les vitraux de la cathédrale du Saint-Rosaire, à Regina.

Le vitrail le plus remarquable de la co-cathédrale de Gravelbourg demeure celui représentant la sainte patronne de la paroisse, Notre-Dame-de-l’Assomption.

Les autres sont regroupés en séries : les Mystères joyeux, les Mystères douloureux, les Mystères glorieux, ainsi que des scènes de l’archange Michel, de l’archange Gabriel, et de Moïse devant le buisson ardent.

« Le vitrail restauré représente le Couronnement d’épines, qui fait partie des Mystères douloureux. Ces cinq vitraux racontent la triste histoire de la crucifixion du Christ. »

Désormais, le nom de Dolorès Ferraton s’ajoute donc à l’histoire du lieu. « On est très chanceux d’avoir quelqu’un comme Dolorès. Ce qu’elle a réalisé est superbe », se réjouit André Moquin, bénévole à Gravelbourg.

Pour l’artiste, la motivation est claire : « La co-cathédrale est une source de fierté. Je ferais beaucoup pour préserver ce bâtiment, surtout pour sa valeur historique, plus que religieuse. »

Une préservation coûteuse

En 2024, un fonds de fiducie a été créé par des membres de la communauté locale en vue de préserver la cathédrale.

« Nos parents et grands-parents nous ont légué cet édifice. Ils se sont imposé une taxe pour le construire. C’est maintenant notre devoir de faire en sorte que les générations futures puissent en prendre soin », explique André Moquin, membre du comité de préservation, responsable du fonds.

« Il faut distinguer la paroisse du bâtiment. L’argent du fonds ne sert pas au fonctionnement de la paroisse, mais exclusivement aux projets de restauration du lieu », précise-t-il.

Le fonds est permanent : seuls les intérêts pourront être utilisés, et l’objectif initial est ambitieux puisqu’il s’agit d’atteindre un million de dollars.

« Entretenir un édifice de cette ampleur, ça prend de l’aide. Rien que la rénovation des portes d’entrée a coûté environ 40 000 dollars. »

En outre, puisque la co-cathédrale est à la fois un lieu historique municipal et national, « la Ville de Gravelbourg s’est engagée à verser 100 000 dollars au fonds. C’est encourageant, souligne André Moquin. Maintenant, on espère que les gouvernements provincial et fédéral emboîteront le pas. »

Mais pour l’instant, ce sont surtout des bénévoles qui assurent la survie de l’édifice.

« C’est bien beau de dire que c’est un lieu historique national, mais la nation ne met pas un sou. C’est aberrant qu’un monument historique repose sur les épaules d’une poignée de citoyens », regrette le bénévole.

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