Plan d'action sur la santé mentale : quelle place pour les Fransaskois?
Andrea DesRoches
Analyste de recherche au Réseau Santé en français de la Saskatchewan (RSFS.)
Photo: Martin Kakra-Kouame (2015)
Quelle est la place conférée au problème des barrières linguistiques dans le Plan d’action du gouvernement de la Saskatchewan, en particulier pour la composante francophone de la province? C’est un des points sur lesquels le Forum Santé a cherché à apporter un éclairage dans l’atelier consacré au thème : Les Fransaskois dans le Plan d’action en santé mentale de la province, animé par Andrea DesRoches, analyste de recherche au Réseau Santé en français de la Saskatchewan (RSFS.) (1)
L’analyse effectuée par le RSFS indique que les recommandations du gouvernement abordent la « notion des barrières linguistiques auxquelles les francophones de la province font face », mais « ne présente pas vraiment de vue d’ensemble de la réalité des minorités linguistiques officielles ». L’analyse souligne le fait que certaines recommandations du Plan d’action gouvernemental s’appliquent à la minorité fransaskoise, notamment en ce qui concerne la réponse aux besoins d’une population diverse, la création d’une main d’œuvre représentative, la prévention des maladies mentales grâce à la promotion de la santé mentale des enfants et des jeunes et le soutien aux familles.
Toutefois, l’analyse rapporte que l’importance de nouvelles recherches sur les services en santé mentale et sur les indicateurs de la santé mentale applicables à cette population de la province (francophone) reste une préoccupation non reflétée dans le rapport du gouvernement. Ce faisant, le RSFS réaffirme dans l’analyse présentée par Andrea DesRoches l’urgence d’entreprendre « des recherches pour déterminer l’incidence, la prévalence et la gravité des problèmes de santé mentale parmi cette population minoritaire de la Saskatchewan et de procéder à une comparaison avec la population de la majorité linguistique ».
Un moment fort de la présentation de l’analyse reste l’appel à l’action formulé « dans le contexte d’un pays ayant deux langues officielles », puisque la Loi canadienne sur la santé de 1984 garantit le droit aux services de santé nécessaires à tous les Canadiens. Le document d’analyse du RSFS met en exergue le fait que les francophones de la Saskatchewan s’attendent à recevoir des services, y compris de santé mentale, dans la langue officielle de leur choix. De fait, plusieurs participants sont revenus sur la notion que « les services de santé mentale devraient en plus comprendre l’évaluation des risques potentiels pour soi-même et les autres, si l’on veut assurer la sécurité de tous ».
En effet, une enquête réalisée en 2010 sur les besoins en matière de santé mentale chez les nouveaux arrivants francophones en Saskatchewan (Réseau santé en français de la Saskatchewan, 2010), révèle que l’accès aux soins primaires est un défi majeur pour la population francophone de la Saskatchewan et que des communautés telles que celles des nouveaux arrivants sont particulièrement vulnérables. Près de 40% parmi les nouveaux arrivants éprouvent de la difficulté à expliquer ce qu’ils ressentent au médecin anglophone et à comprendre les explications fournies par ce dernier, alors que la communication médecin-patient est essentielle à l’établissement du diagnostic.
En outre, à cause de la barrière de la langue, près du quart des nouveaux arrivants ne vont pas voir de médecin ou n’ont simplement pas de médecin de famille. En plus des risques liés à l’absence de suivi médical, ils se livrent à l’automédication systématique, avec tout ce que cela comporte comme dangers et conséquences potentiels sur leur santé et leur bien-être. Par ailleurs, l’enquête révèle que plus de 60% des Fransaskois de souche sont des aînés de 60 ans et plus qui préfèrent de loin l’accès aux services en français. En outre, en raison de leur âge et de leurs conditions, cette population exerce une pression importante sur le système de santé.
(1) En effet, pour traiter efficacement les problèmes de santé mentale et de dépendances, le gouvernement de la Saskatchewan a adopté un Plan d’action décennal issu des recommandations formulées par la Dr Fern Stockdale Winder, psychologue et Commissaire du Plan. Ces recommandations ont fait l’objet d’une présentation en guise de conférence principale, lors du Forum sur la Santé mentale organisée par le Réseau Santé en français de la Saskatchewan (RSFS) – Voir l’édition de « L’Eau vive » - 4 au 10 juin 2015 – Volume 44, no 22 (page 8).
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